Le tissage à l’origine de l’informatique ? (1)
Lors de ma visite au Musée des Tissus et des Arts décoratifs (Le génie (méconnu) de la Fabrique), j’ai été impressionné par les motifs des tissus, un domaine où je ne m’y connais vraiment pas grand chose. J’ai également été frappé par le fait de voir les prémisses de l’informatique avec des images en pixels et des machines à tisser programmées pour créer telle ou telle parure. L’informatique ne se résume pas à nos ordinateurs derniers cris, ses racines sont plus profondes que je ne pensais. Et pour comprendre les origines de l’informatique, il va falloir se pencher sur… le tissage !
Principe de tissage
A la base, le tissage n’est pas un truc de mémé rétro-ringard (tout comme le tricot) ! Il s’agit d’une technique permettant la réalisation d’un tissu par entrecroisement de fils de chaîne et de trame.
Les fils de chaîne se présentent dans le sens de la longueur d’un tissu et les fils de trame dans le sens de la largeur (ou laize). Dans le tissage manuel, la chaîne se sépare en deux ou plusieurs sections entre lesquelles s’insère la trame. Dans le tissage industriel, le même principe se complexifie.
Dans tous les cas, l’entrecroisement des fils de chaîne et de trame entre-eux permet d’obtenir différents aspects ou dessins : les armures. Rien à voir donc avec les armures de chevalier ou de samouraï ! Pour les plus curieux, sachez qu’il existe trois armures fondamentales en fonction de leur type d’entrecroisement : armure de serge, unie et satin. Mais ce n’est pas un cours de tissage alors, passons, passons.
Retenez quand même que le point de liage correspond au point d’intersection entre le fil de chaîne et le fil de trame.
- Quand un fil de trame passe au-dessous d’un fil de trame : c’est un pris.
- Quand un fil de trame passe au-dessus d’un fil de chaîne : c’est un laissé (ou sauté).
La mise en carte
La représentation graphique d’une armure est réalisée à partir d’une mise en carte. Celle-ci correspond à un papier quadrillé où les interlignes verticaux représentent les fils de chaîne et les interlignes horizontaux les fils de trame. Chaque pris est représenté par un carré plein. Le tout représente le motif sous forme de dessin. Voici un exemple de mise en carte pour la réalisation en tissu du portrait de Catherine II (1771) et le détail des carrés plus bas.
Tu ne trouves pas que ça fait penser à une image en pixel ? Cela m’a évoqué en tout cas ma première console Nintendo, les jeux 8 bits, la compression des images JPEG, les retouches Photoshop et j’en passe !
Principe du métier à tisser
Après le tissage à la main est arrivé le métier à tisser pour aller plus vite et augmenter la rentabilité. Il est composé de plusieurs parties :
- Une ensouple arrière qui porte les fils de chaîne en attente de tissage.
- Une ensouple avant qui enroule le tissu réalisé.
- Deux lames indépendantes (ou cadres) qui lèvent certains fils de chaîne pour ouvrir un passage au fil de trame.
- Une navette qui porte le fil de trame dans sa canette.
- Un peigne qui tasse le fil de trame après chaque passage de la navette.
La technique est simple : les lames sont écartées une fois sur deux et, à chaque fois, la navette passe le fil de trame entre les fils de chaîne : le tissu de forme petit à petit. La succession de fils visibles ou cachés créé le motif du tissu. Seulement, avec deux cadres, les possibilités de couleur sont limitées. Plus il y a de cadre, plus les fils peuvent être levés individuellement et plus les motifs seront être variés et complexes.
C’est là que la mise en carte est essentielle pour s’y retrouver sinon c’est vite le bordel avec tous ces fils. Et encore, même avec la machine à tisser, cela reste à travail très fastidieux. Ça ne serait pas formidable si la machine pouvait tout faire automatiquement ?! Eh bien, ce fut le cas avec la célèbre machine Jacquard qui a posé les bases de la programmation. La suite au prochain article et début de la pub sur le tissage Peiffer à l’origine de la belle toile des Vosges !
Dossier sur le tissage et l’informatique
– Le tissage à l’origine de l’informatique ? (2)
– Le tissage à l’origine de l’informatique ? (3)
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J’attends avec impatience la suite en ruminant un Perlisisme : « Un programme sans boucle et sans structure de donnée ne vaut pas la peine d’être écrit. »(Perlisismes : les dictons informatiques d’Alan Perlis).
Bon, j’ai pas la patience d’attendre alors voilà :
Même s’il est clair qu’historiquement on pouvait définir la séquence d’un métier à tisser (ou d’un orgue de barbarie) avec des cartes perforées, à mon humble avis la programmation est née avec la boucle.
Et selon l’article Who created the idea(s) of the first loop constructs ?, la première est due à Ada Lovelace qui a ainsi codé… ça alors! Les nombres de Bernoulli dont je viens de causer dans mon billet : Pyramides et sommes de puissances.
Je veux bien te croire, je ne suis pas une bille dans ce domaine.
😛
J’en profite pour informer nos lecteurs que Dr Goulu a publié un article en réaction à celui-ci sur la première boucle, primordiale en informatique pour lui. Intéressant à lire !