Elle a des sacrées paires de jambes !

Mosaïques : HumanusScience

samedi 21 décembre 2013

J’adore les conférences TED aux thèmes souvent intéressants et, cerise sur le gâteau, bon nombre d’eux sont sous-titrés en français. C’est dans ce contexte que j’ai découvert deux interventions de Aimee Mullins sur ses jambes.

Elle est née sans tibias et depuis, elle porte des prothèses. Elle nous partage son vécu sous un angle qui me plaît beaucoup et qui change de notre vision pessimiste sur le handicap. Je vous invite à regarder ces vidéos d’une vingtaine de minute chacune. Elles en valent la peine. Il suffit de cliquer sur le titre de l’image pour y avoir accès.

Aimee Mullins : La chance de l’adversité

Je vous partage ces vidéos car le moment me semble adéquat : le fameux esprit de Noël qui efface les malheurs du monde, où tout le monde s’envoie des bisounours, où l’argent s’envole, où le portefeuille se vide pour certains et se remplit pour d’autres.

Je vous partage ces vidéos pour la raison également que je retrouve pas mal de points commun avec mon vécu. Par exemple, dans l’intervention ci-dessus, elle liste les termes utilisés autour du mot « handicap ». J’utilise le même procédé lors de mes séances de sensibilisation pour montrer la force de l’impact que peuvent avoir les mots sur nous. Je crois au pouvoir de la langue car elle influence en grande partie notre perception du monde.

De même, je suis d’accord avec elle qu’il est crucial de transformer notre particularité en atout et de bien montrer tous les points positifs qu’elle peut engendrer, sans pour autant gommer ni nier les difficultés ou les points négatifs. J’ai d’ailleurs développé ce concept dans un billet : La pensée exprimée : regards croisés.

Aimee Mullins et ses 12 paires de jambes

Dans la deuxième intervention, elle aborde sa douzaine de jambes et ses interventions auprès des enfants. Dans un premier temps, le contact se déroule sans les adultes. Les enfants peuvent alors s’exprimer directement et en toute liberté, loin des préjugés imposés par les « grands ». Aimee Mullins n’est pas handicapée, elle a l’incroyable talent de changer de jambes et donc de forme et de taille !

Une fois de plus, je m’y retrouve en utilisant le même procédé dans les écoles primaires où je cantonne les adultes au fond de la salle. Je limite également leurs questions pour privilégier celles des enfants. On s’en prend plein la gueule et ça fait du bien car cela permet de discuter de tout, loin du misérabilisme ou de la sacralisation. Je ne suis pas handicapé, j’ai une particularité que je partage avec d’autres et rien que ça, cela change tout.

L’autre point qui m’a interpellé et sa vision de la beauté. Grâce à la technologie, elle a la possibilité de s’affranchir de ses limites et de pouvoir choisir ses jambes en fonction de ses humeurs, et même de sa taille. Ses prothèses dépassent alors le cadre strictement médical et fonctionnel. Ce qui est rigolo, c’est que j’ai eu la même démarche en exigeant (et en obtenant sans mal) des appareils auditifs plus jolis à mes yeux. J’ai écrit deux billets dessus : Des appareils auditifs kickers et Encore un peu d’efforts sur le design des appareils auditifs ! Depuis, je suis attaché à l’aspect utilitaire de mes prothèses mais aussi à leur esthétisme. Cela reste difficile tellement les gens oublient, voire ne comprennent pas cet aspect.

Pour finir, elle a également abordé la notion de réalité. Rien qu’en modifiant de taille, son regard sur le monde et les regards sur elle changent. Il ne suffit pas de grand chose pour modifier notre perception car la réalité est toute sauf fixe. C’est un sable mouvant qui ondoie en permanence. Et vous savez quoi ? Deux billets en font écho : Entre les bruits et entre les silences et La réalité changeant du cerveau. En effet, j’ai le choix entre entendre ou ne pas entendre rien qu’en allumant ou en coupant mes appareils auditifs. Beaucoup m’envie cette possibilité alors que jamais je n’envie leur capacité à entendre des sons qui m’échappent. N’est-ce pas curieux au fond ? Peu importe, si la forme diverge, nous nous rejoignons sur le fond du message.

Et la science dans tout ça ?

Aimee Mullins aborde la médecine classique qui la classe de manière très négative dans ce qu’elle n’a pas et donc dans ce qu’elle ne pourrait pas faire. Sa vie ne cesse de prouver le contraire. Il y a donc une divergence, voire même un clash, entre la médecine qui sait tout et qui, au final, ne sait pas grand chose. Oui, c’est souvent le cas car les médecins se focalisent sur la pathologie en oubliant un facteur essentiel : l’individu dans sa globalité et ses immenses capacités d’adaptation. C’est ce que je rencontre souvent dans mon vécu où je dois affirmer mes opinions face à une science qui veut m’imposer sa vision, autrement dit me coller une étiquette qui ne me correspond pas.

La science, pourtant, peut être également une bonne chose. C’est par la technologie qu’Aimee Mullins peut changer de réalité via ses prothèses sophistiquées. Tout comme je peux le faire grâce à mes appareils auditifs. Cependant, trop de technologie peut être néfaste car elle induit également la notion de « réparation » et on revient aux travers de la médecine. Faut-il donner la possibilité d’élargir notre relation avec le monde ou faut-il revenir à la norme ? Ou est la limite, jusqu’où pouvons-nous aller ? Être un « humain augmenté » est-il toujours une bonne chose ?

J’ai voulu vous partager ces vidéos car j’ai trouvé intéressant le nombre de poins communs entre son vécu et le mien alors que notre particularité est très différente à la base. Cela m’a fait penser à la phylogénétique qui a pour but d’établir les relations de parenté entre les êtres vivants. Comment ? En se basant sur des caractères communs. Plutôt que me focaliser sur les points où je ne suis pas d’accord avec elle, j’ai préféré montrer ce que nous avions en commun. En appliquant cette démarche à tous les gens que j’ai rencontré, c’est fou de voir à quel point nous sommes à la fois semblables dans notre différence. C’est cette richesse que j’aime et que j’ai voulu partager au fond.

*Esprit de Noël à fond les manettes Rock’n’roll
Ça déchire même les Bisounouuurs !*

PS : Et si jamais, y’en a que mon billet dérange, qui n’est pas d’accord avec moi, alors je reprends le refrain de ma grand-mère en sautillant gaiement sur mon chemin.

Pompons la merde et pompons-la gaiement,
En envoyant s’faire foutre
Ceux qui n’sont pas des frères.
Pompons la merde et pompons-la gaiement,
Et envoyons s’faire foutre
Ceux qui n’sont pas contents.

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2 Pierrot ont pris leur plume. Et toi ?

  1. sofi

    Témoignage admirable !!
    Mais étant dans le milieu, il est rare d’avoir les moyens de s’offrir 12 paires de prothèses, ce n’est malheureusement pas accessible à tout le monde…

    dimanche 22 décembre 2013 à 18 h 25 min
  2. Sirtin

    C’est sûr que ce n’est pas donné à tout le monde, sans compter la garde-robe à adapter pour 5 tailles différentes…

    dimanche 22 décembre 2013 à 23 h 02 min

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