L’autruche, un animal taillé pour la course

Mosaïques : FocusScience

mardi 22 décembre 2015

Un visiteur m’avait fait remarquer que l’autruche exposée dans la vitrine aux oiseaux ne possédait que deux doigts à chaque patte. Ah bon ? Je m’approche de plus près et, stupeur ! tremblements ! il n’a que deux doigts à chaque patte ! La preuve en image. Comment cet oiseau si rapide à la course fait pour ne pas se casser la gueule ? Et pourquoi deux doigts seulement ? Cela méritait bien un article là dessus.

Pattes d’autruche

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Un oiseau très rapide

Fait remarquable, les oiseaux partagent avec les humains une caractéristique très rare. Ils sont les seuls vrais bipèdes alors que la majorité des animaux se meuvent sur 4, 6 pattes, voire plus ou… rien !

L’autruche se déplace donc en marchant et fait partie de la famille des Ratites (oiseaux coureurs) qui rassemble également les émeux, nandous, kiwis et casoars. C’est même le plus rapide des oiseaux terrestres. Avec ses enjambées de plus de 6 mètres, elle peut courir à 40 km/h pendant une demi-heure et sprinter à plus de 70 km/h avec des pointes proches de 100 km/h sur de très courtes distances. Elle bat donc la lionne à la course. De plus, le doigt le plus gros, pourvu d’un ongle, possède une puissance de frappe de 400 kg à l’impact : de quoi éventrer les prédateurs tels que… la lionne !

L’autruche est aussi le plus grand oiseau vivant : de 1,90 m (femelles) à 2,50 m (mâles) avec un poids allant de 90 kg (femelles) à 150 kg (mâles). Il est supposée être issu d’une très ancienne lignée, de plus de 60 millions d’années d’existence. Et dernier fait étrange : les yeux de l’autruche occupent les deux tiers de sa tête ! Ils sont donc plus gros que son cerveau, ce qui lui donne une acuité visuelle exceptionnelle : l’autruche peut voir un objet en mouvement jusqu’à 3,5 kilomètres. De quoi largement repérer les dangers de loin avant de prendre la poudre d’escampette !

Le bond d’une autruche dans le désert

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Une anatomie particulière

Déjà, ne vous fiez pas aux pattes des autruches. Ce qui semble être leur genou ne l’est pas en réalité. L’image ci-dessous représente trois informations :

  • Les zones beiges qui montrent la répartition musculaire. Chez l’autruche, elle est concentrée sur la partie supérieure de la patte alors qu’elle est répartie le long de la jambe d’un humain.
  • Les lignes rouges qui font correspondre les articulations ayant une position anatomique similaire.
  • Les lignes vertes qui font correspondre les articulations ayant une fonction similaire.

Ainsi, chez les autruches, le genou est caché sous leur plumage. Il est toujours fléchi et il est connecté à l’articulation de la hanche par un petit fémur horizontal. Ce que qu’on croit être leur genou est en fait leur cheville. Ce qui explique pourquoi on a l’impression de voir un oiseau plier son « genou » vers l’arrière. Le tibia correspond à l’os entre la cheville et le genou. Chez l’autruche, c’est l’équivalent fonctionnel de notre fémur. Et enfin, il y a l’os entre la cheville et les orteils de l’autruche. Il s’appelle le tarsométatarse et c’est l’équivalent fonctionnel de notre tibia.

Pfffiou, le bordel pour comprendre et pourtant le secret de la vitesse des autruche réside dans ces particularités anatomiques ! Voyons ça de plus près.

Anatomie comparative entre
des pattes d’autruche et des jambes d’un homme


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Ses tarsométatarses sont bien plus longues que nos tibias et l’autruche possède même les plus longues pattes et la plus grande longueur de pas en course : 6 mètres. De plus, nous avons vu que la plus grande partie de sa musculature est située très haut sur l’os de la cuisse et la taille. D’autre part, les parties inférieurs des pattes sont très légères, mues par des tendons longs. Cette répartition de masse optimise ainsi la course à vitesse élevée.

C’est comme un métronome dont on a rapproché le point près du pivot (à la base) dans le but d’accélérer le tempo. Des pattes plus longues permettent une plus longue étendue des bonds. La masse musculaire était proche du corps, les pattes peuvent rebondir plus vite.

Mouvement rapide d’un métronome

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Des articulations stables

Les humains peuvent grimper aux arbres ou danser grâce à leurs articulations. Cette souplesse a cependant un prix : notre puissance musculaire sert à nous propulser tout en évitant le mouvement latéral des articulations sinon bonjour l’entorse ! Ce qui n’est pas le cas des autruches. Leurs ligaments agissent comme un « corset » autour de la cheville. Quand la patte est étendue, les ligaments sont tendus et stabilisent l’articulation (en rouge). Quand la patte est fléchie, les ligaments se relâchent (en vert).

Il faut même exercer une force de pression de 14 kg minimum sur le dessus de la patte pour qu’elle se fléchisse. En relâchant la pression, elle reprend sa position étirée, comme un élastique, clac ! ce qui renforce l’effet « rebondissant » des pattes de l’autruche.

Les ligaments d’une patte d’autruche

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Un contact puissant avec le sol

La morphologie des doigts de l’autruche est un autre facteur expliquant leur vitesse de course. En avoir moins, c’est déjà réduire encore plus la masse de la patte inférieure. Comme chez les chevaux modernes qui ne possèdent qu’un doigt (le sabot qui est l’ongle de l’orteil) contre cinq chez leurs ancêtres.

En fait, le gros orteil de l’autruche supporte une grande partie de la masse corporelle et le petit orteil agît comme un stabilisateur pour éviter que l’autruche se casse la gueule, surtout pendant une marche lente. Et n’oublions pas la griffe du gros orteil ! Pendant la marche, elle touche à peine le sol et pendant la course, elle exerce une pression allant jusqu’à 40kg/cm². La griffe pénètre le sol tel un marteau-piqueur afin d’assurer une prise fiable à 70 km/h pour mieux rebondir.

Pour aller plus loin…

Les autruches ne sont pas réputées pour leur intelligence (pas étonnant avec leurs yeux exorbités) mais ce sont des sacrées sprinteuses ! Tout leur corps est conçu pour cette fonction et elles peuvent même rivaliser de vitesse les oiseaux en vol. C’est fou tout ce qu’on apprend en partant de deux doigts de pied… Ah oui, merci à Nina Schaller pour son article très intéressant : Pourquoi les autruches courent si vite ? Sans elle, je n’aurais pu écrire le mien !

En bonus, j’ai trouvé un site sympa qui décrit les différents types d’oiseaux. Et aussi les ailes, les becs et j’en passe. De quoi déduire le mode de vie des oiseaux en fonction de leur anatomie. C’est synthétique et agréable à lire : A propos des oiseaux

Types de pattes d’oiseaux

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  • 1. Autruches : ce sont les seuls oiseaux au monde à n’avoir que deux doigts à chaque patte. Le gros doigt intérieur est armé d’une lourde griffe qui peut infliger des blessures terribles à un ennemi.
  • 2. Oiseaux terrestres : beaucoup d’oiseaux terrestres n’ont que trois doigts pointant vers l’avant. Ceux-ci sont courts, larges et bien adaptés à la course.
  • 3. Échassiers : les grandes pattes et les quatre longs doigts des hérons, cigognes, bécasseaux, et autres échassiers leur permettent de marcher en rond dans des eaux peu profondes.
  • 4. Jacanas : les très longs doigts des jacanas leur permettent de marcher sur la végétation à fleur d’eau en répartissant leur poids sur une large surface. Comme les échassiers, il y a trois doigts à l’avant et un doigt à l’arrière de la patte.
  • 5. Pics, barbicans et perroquets : ils possèdent deux doigts pointant vers l’avant et deux doigts pointant vers l’arrière. Ceci leur permet de grimper aux troncs des arbres.
  • 6. Oiseaux de proie : les aigles, hiboux, et autres oiseaux de proie ont des doigts puissants et des griffes acérées qu’ils utilisent pour attraper et tuer leurs proies. Trois doigts vers l’avant et un doigt vers l’arrière de la patte.
  • 7. Martinets : ils ne peuvent pas se percher sur une branche. Leurs quatre doigts pointent vers l’avant, leur permettant de s’accrocher à des surfaces verticales comme des murs ou des falaises.
  • 8. Grèbes : contrairement à la plupart des oiseaux nageurs, les grèbes n’ont pas les pieds palmés. A la place, des surfaces plates sur les côtés de leurs trois doigts les élargissent pour leur permettre de nager.
  • 9. Oiseaux de perchoir : les doigts de la plupart des oiseaux ont cette configuration. Trois doigts vers l’avant et un vers l’arrière. Cela leur permet de se percher sur les branches et autres perchoirs étroits.
  • 10. Oiseaux nageurs : les canards et autres oiseaux nageurs ont les pieds palmés. Leurs trois doigts sont reliés par de la peau.

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1 Pierrot a pris sa plume. Et toi ?

  1. Pierrot quette

    Merci, même moi (!) apprends chez vous. 😉

    mardi 29 décembre 2015 à 10 h 10 min

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