Le panache de cendres du volcan Eyjafjöl peut-il influer sur la luminosité ?

Mosaïques : FocusScience

mercredi 15 décembre 2010

Dans son commentaire à mon article sur le volcan Eyjafjöl et les caractéristiques de son panache de cendres, Escher ajoute son point de vue en tant que photographe amateur alors qu’il était à Angers lors de l’événement.

Je ne sais pas si je voyais les choses comme j’avais envie de les voir mais toujours est il qu’à cette période d’éruption je me souviens m’être fait la remarque que la lumière était bizarre, fait que j’avais alors rapporté à l’éruption. […] Ce que j’entends par bizarre… Comme tamisée, fade, sans couleur. Comme dans ses scènes de film censées être de nuits. Un peu comme ces villes cachées par un nuage de pollution. Ou encore comme ces chaudes journées d’été, à la fois sans nuages et orageuse. […]

Je m’étais alors posé la question si le panache de cendres en France était capable d’influer sur la luminosité ambiante en fonction de sa localisation, de sa composition et bien sûr de sa densité ? Escher, de nouveau argumente.

Même si la concentration de ces poussières est faible dans l’air, une poussière va arrêter un rayon, et le rayon voisin passera peut être, mais celui d’après pourra aussi être arrêté un kilomètre plus loin. Un peu comme sous la pluie. Trois gouttes d’eau en mouvement ne nous empêchent pas de voir, mais on voit moins loin qu’avant. Et d’ailleurs on remarque parfois sous les nuages ces colonnes grises indiquant qu’il pleut. Et pourtant l’eau est transparente.

Composition et formation de nuages

Du coup, avant d’enchainer, j’aimerais prendre le cas des nuages « banals », blancs, gris, noirs et de forme variée selon les circonstances. Contrairement à une idée reçue, les nuages ne sont pas composés de vapeur d’eau qui est invisible mais de gouttes d’eau ou de cristaux de glace de très petites tailles (quelques centième de millimètre). En fait, sous l’effet de la chaleur du soleil, l’eau présente à la surface de la terre (mers, rivières, flaques…) est transformée en vapeur et monte dans les airs. En rencontrant une couche d’air froid, la vapeur se refroidit et se condense autour de noyaux de concentration, formant alors les gouttes d’eau ou les cristaux de glace. Ces noyaux de condensation correspondent à des minuscules particules d’origine diverse :grains de poussière, de sable, de suie, gaz résiduels de l’industrie ou de la combustion des cendres, cristaux de sel provenant de l’évaporation de l’eau de mer… Le nombre de ces noyaux est généralement très élevé et les particules de poussière sont particulièrement abondantes.

Formation des précipitations
[Source image]

Absorption de la lumière par les nuages

Primo, les nuages contiennent donc des molécules d’eau qui diffusent toutes les longueurs d’onde de la lumière dans toutes les directions. C’est pourquoi un nuage nous paraît blanc. Mais cela n’entraîne pas forcément une baisse de l’intensité lumineuse, spécialement pour les nuages « hauts », contrairement aux nuages « bas » qui diffusent une grande partie des rayons lumineux vers le haut. Deuxio, ces mêmes nuages sont chargés en particules diverses qui participent aussi à la diffusion de la lumière. Ce qui explique, à mon humble avis, pourquoi nous voyons les nuages mais aussi les colonnes de pluie au loin suivant l’angle d’observation et la densité en gouttelettes et grains de poussière.

Diffusion lumière solaire par les nuages
[Source image]

Famille des nuages

Pour finir sur les nuages, il en existe quatre principales familles [Famille – Racine latine – Altitude moyenne de la base] :

  • Étage supérieur – CIRRUS – 6 000 à 13 000 m
  • Étage moyen – ALTO – 2 000 à 6 000 m
  • Étage inférieur – STRATUS – Sol à 2 000
  • A extension verticale – CUMULUS – 500 à 6 000 m

Différents types de nuage
[Source image]

Revenons à nos cendres !

Or, le panache des cendres du volcan Eyjafjöl était situé à 10 000 mètres d’altitude à proximité du cratère puis aux alentours de 6000 mètres une fois arrivés en France. Ils se trouvaient donc dans l’étage supérieur. En se basant sur le modèle des nuages, le panache de cendres était en haute altitude donc susceptible de bien laisser passer la lumière. Seulement, ce panache n’était pas constitué majoritairement de gouttes d’eau mais de minuscules particules de roches déchiquetées dont plus de la moitié correspond à du silice ou du quartz, soit des minéraux très durs. La lumière devrait donc être « bloquée » mais tout dépend de la densité du panache, de la même manière qu’un nuage nous paraîtra gris car il est plus épais et « filtre » davantage la lumière ou parce qu’il est placé sous un autre nuage.

Bref, il se trouve que le satellite Calispo survolait l’Europe le matin du 17 avril 2010. Il a sondé l’atmosphère au-dessus de la France grâce à des impulsions lasers dont une partie plus ou moins grande est renvoyée vers le satellite selon la densité des obstacles que la lumière rencontre en chemin. Résultat ? Ce jour là, le nuage présentait une faible densité :

Contrairement aux nuages d’eau situés avant et après lui sur la trace du satellite, le nuage de cendres laisse passer une bonne partie des impulsions laser de Calipso, révélant du même coup la couche de pollution se trouvant plus bas, concentrée dans les 200 premiers mètres d’altitude.

Calipso traverse les cendres d’Eyjafjöll
[Source image]

Si le panache présentait une faible densité, a priori la lumière pouvait largement passer et donc soit Escher a rêvé, soit il a bien constaté une baisse de la luminosité due à une autre cause. Mais ! Mais ! Tout dépend une fois encore du jour de son observation : peut être que le « nuage » de cendres était plus dense lors de son observation. S’il est connu que les éruptions volcaniques peuvent influer sur la température d’une zone donnée, il n’est pas fait mention d’une baisse de la luminosité (en dehors de la proximité du cratère bien sûr !). Quoiqu’un article datant du 16 avril 2010 jette à nouveau le doute :

Le nuage de cendres survole une grande parte du nord de l’Europe depuis jeudi, y compris la moitié nord de la France ce vendredi, sans aucune conséquence toutefois sur les conditions météorologiques. Seule une infime baisse de la luminosité, imperceptible par l’œil humain, peut se produire.
[Source extrait]

En conclusion, Escher a-t-il raison d’affirmer que Tout cela n’est rien comparé à ce que je vois dans ma tête ! ?

En savoir plus…
Le volcan islandais n’affectera pas le climat
Qu’est-ce qu’un coucher de soleil ?

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4 Pierrot ont pris leur plume. Et toi ?

  1. Escher

    Oula !!! Pas si vite l’Arlequin!!! Tout le monde va croire que je carbure aux champi! ^^

    J’apporte mon témoignage, mais c’est vrai que c’est une constatation assez troublante. Le phénomène semblait durer plusieurs jours, et ça parlait à balle de l’éruption à ce moment là. Après j’ai pas trop poussé les recherches non plus. Mais bon ça ne m’étonnait pas que ça puisse venir du volcan. Je me souvenais aussi que les volcans on la réputation de créer de magnifique couchés de soleil, quoi que fait un peu en contradiction avec mes observation de lumière fade.
    Et puis je me suis rappelé aussi ce qui s’est produit y a deux cents ans! Pauvre Louis Croix Vé Barre…
    Des volcans pour une révolution
    Mais en fait ils parlent majoritairement de changement climatique, et peu d’atténuation de la lumière, ce que j’avais surtout retenu.

    jeudi 16 décembre 2010 à 17 h 44 min
  2. Sirtin

    Hé, hé, je n’ai pu m’empêcher de te taquiner.
    😉

    Oui, les volcans peuvent influer sur la couleur des couches de soleil (voir lien que j’ai donné en bas de l’article) et sur le climat.

    Pour finir, la dernière phrase est une citation de Maurits Cornelis Escher, célèbre graveur pour ses illustrations qui déroutent l’œil et l’esprit.

    vendredi 17 décembre 2010 à 22 h 51 min
  3. Escher

    Ah oui.. Pas faux ^^
    Arf… C’est que je prends son nom pour pseudo parce que j’adore ses oeuvres mais en fait tu as l’air de mieux le connaitre que moi! :-S

    mardi 21 décembre 2010 à 17 h 41 min
  4. Sirtin

    Pas faux ? Ce qui veut dire que tu confirmes te shooter aux champi ?
    :mrgreen:

    Pas vraiment, je connais surtout ses œuvres grâce à mon poupa mais pas grand chose de l’artiste. 😛

    mercredi 22 décembre 2010 à 0 h 11 min

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