La Jolla tablet, de la poudre de perlimpinpin ?

Mosaïques : En vracMôa ! Et vous...

mardi 19 janvier 2016

En février 2015, j’annonçais avec enthousiasme l’apparition d’une nouvelle tablette alternative, la Jolla tablet. Elle présentait des caractéristiques intéressantes dont la possibilité de diviser l’écran en deux, la compatibilité avec les applications Android et le système d’exploitation dérivé de Linux, Sailfish OS 2.0 (encore à l’état de prototype).


[Source image]

J’ai même participé à la campagne de Indiegogo, lancée fin 2014. Pour rappel, plus de 2 millions de dollars ont été récolté grâce au don de plus de 21.000 contributeurs ! La Jolla tablet a été également saluée par les médias en ligne spécialisés, récompensée par le Prix de la Meilleure tablette du Congrès mondial du mobile à Barcelone en mars 2015. De quoi donner confiance et avoir la garantie de recevoir un produit de qualité.

Las ! Les retards se sont accumulés et l’entreprise a connu des difficultés financières. A tel point qu’en décembre 2015, la Jolla tablet n’était toujours pas envoyée. Pire, le directeur de la communication, Juhani Lassila, informe dans un communiqué en janvier 2016 que :

Les problèmes financiers de novembre-décembre ont malheureusement eu un impact plus important sur ​​ce projet que nous pouvions l’anticiper. Nous ne disposons pas de toutes les pièces du puzzle, mais quelque chose est maintenant certain : nous sommes heureux de dire que nous allons expédier un petit lot supplémentaire de la Jolla Tablet aux backers dès début 2016, avec des invitations envoyées au cours du mois de janvier. La mauvaise nouvelle ici est que nous ne sommes pas en mesure de terminer la production. En d’autres termes, l’ensemble de nos backers ne pourra pas obtenir une Jolla Tablet. Cependant, vous pouvez être sûr que vous ne finirez pas les mains vides. Nous pourrions même avoir quelques surprises positives en stock pour vous. Mais en attendant, soyez libre de spéculer.

Une annonce plutôt désinvolte qui ne fait que renforcer l’image négative de l’entreprise. Que s’est-il passé pour arriver à cette situation ? D’après l’article Crowdfunding et le nouveau syndrome de Helsinki, trois événements majeurs ont pesé fort sur la balance.

Primo, en juillet 2015, Jolla a été divisée en deux sociétés distinctes, une pour le système d’exploitation Sailfish et l’autre aux contours et contenu plus flous, pour le matériel dont la tablette. Jolla n’a plus les moyens de développer en parallèle un système d’exploitation et une tablette, même si sa fabrication était sous-traitée en Chine. Seul son design était finlandais.

Deuxio, en septembre 2015, le nombre de collaborateurs était réduit considérablement à la suite de licenciements et de démissions. Parmi les démissionnaires, il y avait surtout le cofondateur Marc Dillon. C’était l’évangéliste charismatique de l’entreprise.

Tertio, en novembre 2015, Jolla n’a pas obtenu un financement supplémentaire de 10 millions de dollars promis par des investisseurs. Conséquence immédiate : Jolla est mise en redressement judiciaire ou l’équivalent en Finlande. Seul effet bénéfique d’une telle décision : cela permet de geler et restructurer les dettes au moins provisoirement…

Il apparaît donc clairement que la plus grosse partie de l’argent collecté par la campagne Indiegogo a été utilisée pour le financement du développement de la version 2.0 du système d’exploitation Sailfish et non, comme Jolla s’était engagée, à la fabrication et l’expédition des tablettes. Autrement dit, l’entreprise a « détourné » les fonds au détriment des contributeurs ! Il s’agit d’une grosse erreur de stratégie qui se paie maintenant et qui fragilise davantage la relation de confiance établie en 2014.

Et maintenant ? Il ne reste plus que nos yeux pour pleurer car j’ai déjà contacté Indiegogo pour demander un remboursement. Comme par hasard, ils te renvoient la balle et te disent de contacter l’entreprise directement. Et comme Jolla est proche de la faillite, je ne me fais pas d’illusion dessus.

J’ai déjà participé à plusieurs campagnes de crowdfunding, toujours avec succès. C’est la première fois que cette situation m’arrive (ainsi qu’aux autres contributeurs). Il est intéressant de constater qu’une campagne réussie et un projet solide ne suffisent pas toujours pour concrétiser le produit. Tout dépend ensuite du management de l’entreprise et ceci est une autre paire de manches…

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9 Pierrot ont pris leur plume. Et toi ?

  1. Merci pour ton témoignage personnel comme contributeur à la campagne de Crowdfunding de Jolla. je suis heureux que mon article ait été source d’inspiration pour écrire ton témoignage et ressenti.Il est difficile pour un contributeur de pouvoir évaluer le management d’un projet à l’avance effectivement.

    mardi 19 janvier 2016 à 11 h 41 min
  2. Sirtin

    Ton article m’a surtout aidé à y voir plus clair dans la situation et c’est déjà précieux. Dommage quand même d’en arriver à là…

    mardi 19 janvier 2016 à 19 h 32 min
  3. Kmi

    Oups, je ne serai pas étonnée si un groupe se mobilise pour porter plainte. Malheureusement cela risque de ne pas voir le jour si chacun a donné une petite somme d’argent seulement.

    Cela ressemble à cette autre affaire lue quelque part où des malfaiteurs avaient fait fortune en vendant une soirée de rêve(de réveillon je crois) à des centaines de gens et ces gens se sont retrouvés porte close à ladite soirée. Personne n’a voulu porter plainte car les frais d’avocats coutaient plus chers que le prix de la soirée et personne ne voulait s’embêter avec ça.

    C’est de là qu’a été rendu possible l’idée de se mettre à plusieurs pour porter une seule plainte.

    J’espère quand même qu’il s’agira d’un cas isolé dans le monde du crowfunding car il ne faudrait pas que les gens perdent leur confiance et leur dynamisme sur les projets financés par le crowfunding.

    mercredi 20 janvier 2016 à 14 h 44 min
  4. Sirtin

    Tout à fait avec ton dernier paragraphe !

    J’espère quand même qu’il s’agira d’un cas isolé dans le monde du crowfunding car il ne faudrait pas que les gens perdent leur confiance et leur dynamisme sur les projets financés par le crowfunding.

    jeudi 21 janvier 2016 à 15 h 57 min
  5. P@t

    Merci pour ce témoignage. Je suis un des contributeurs ; je possède leur téléphone (ce qui prouve que Jolla donne autre chose que de la poudre de perlimpinpin) ; j’ai donc suivi pas mal les derniers développements. Je voudrai donc apporter quelques précisions et mon point de vue:

    Notamment il était clair depuis le début que cette opération était vendue comme du gagnant-gagnant. Le contributeur gagnait une tablette avec un OS spécial. Pour eux, l’OS avait besoin de pouvoir s’adapter sur n’importe quelle taille d’écran + devait pouvoir s’utiliser sur une tablette (notamment en mode paysage). Donc je ne suis pas d’accord pour dire que l’argent était prévu uniquement pour le hardware !
    Personne n’aurait apprécié recevoir une tablette sans OS ou avec Android. Une grande part de l’intérêt de cette tablette et de cette société est dans son OS!! et pas dans le matériel (ils ont toujours insisté pour dire que le matériel n’était là que pour mettre en avant l’OS qui est leur produit)

    Une autre précision: développer un OS et vendre un appareil demande énormément de fonds. Rappeler vous le téléphone Ubuntu et le montant astronomique qu’ils demandaient (et n’ont pas récolté d’ailleurs). L’argent demandé par Jolla ne couvrait pas les dépenses prévues pour financer à la fois la tablette et l’OS; ils avaient besoin comme toute startup d’un nouveau round de financement. Tout aurait pu marché normalement et personne n’aurait rien vu. Certes ce n’était sans doute pas très clair pour les contributeurs ; mais il faut savoir que le crowdfunding et les startups sont un monde de risques permanents.
    Il y a eu aussi des problèmes sur le hardware: ils ont dû changer l’écran avant l’été, ce qui a retardé la sortie de la tablette. Sans doute que ça leur a coûté de l’argent aussi.

    Enfin, ils ont prévu (dans les prochains jours) de proposer une compensation. A voir ce que c’est mais a priori, ils ne veulent pas laisser un vide. Leur image est cependant évidemment écorné chez beaucoup.
    Il faut savoir aussi qu’ils abandonnent le hardware pour le moment car ils ont pas ni tant de compétences dans ce domaine (ils doivent compter sur des partenaires) ni les ressources pour le softw et le hardw (ils étaient 120 avant le clash de décembre).
    Une constructeur indien (Intex) va a priori annoncer au MWC le lancement d’un téléphone sous SailfishOS…

    Pour info, il y a pleins d’opérations de crowdfunding qui ne marchent pas ou qui sont retardés. Si vous ne le savez pas, c’est que vous n’avez jamais tellement essayé (ou alors eu de la chance)! Il y a même des escrocs alors que parfois ce sont des amateurs qui n’ont pas bien prévu l’ampleur de la tâche. Dans les trucs récents : How Zano Raised Millions on Kickstarter and Left Most Backers with Nothing

    Bonne journée

    vendredi 22 janvier 2016 à 11 h 05 min
  6. MkZ*

    Je rejoins totalement P@t dans son commentaire. J’ai la même analyse.
    Je suis déçu en tant que contributeur que la JollaTablet n’ai pas pu voir le jour, mais je suis fier d’avoir participé à cette aventure.
    L’Europe a totalement déserté la techno des smartphones, délaissant la confidentialité des utilisateurs européens aux bons soins des Apple et autres Google.
    La prise de risque de Jolla est énorme et des erreurs stratégiques ont sans doute été prises par les responsables (peut-être même par l’emblématique Marc Dillon qui a quitté le navire avant qu’il ne commence à prendre l’eau), mais je reste convaincu du bon sens qu’avait notre action de soutenir le projet d’une tablette indépendante (à défaut d’être totalement libre).
    Heureusement Canonical à l’air de bien tenir le choc (même si leur dispersion m’inquiète aussi) et leur projet avance bien : BQ confirme sa tablette convergente sous Ubuntu mais le projet n’est pas le même et le travail effectué par Jolla pour intégrer les applications Android rend son OS plus attractif (à mes yeux).
    J’espère sincèrement que les finlandais vont rebondir… il résonne des rumeurs comme quoi certains pays des BRICS souhaiteraient promouvoir SailfishOS afin de s’affranchir des backdoors des systèmes américains… wait and see.

    vendredi 22 janvier 2016 à 15 h 39 min
  7. Sirtin

    Peut-être mais c’était clair dans la campagne : je contribuais au développement d’une nouvelle tablette qui tournait sous Salfish et rien d’autre. Le portable Jolla ne m’intéresse pas car c’est encore autre chose (je l’ai testé, je l’ai eu en main).

    Dans tous les cas, j’ai déboursé une certaine somme pour concrétiser un projet précis. Ce projet n’a toujours pas vu le jour et cette somme déboursée est partie je ne sais où. La compensation ne m’intéresse pas, c’est une solution trop facile.

    Ce qui est intéressant, c’est que les derniers commentaires semblent aller dans le sens de l’article de Michel Nizon cité dans l’article.
    :mrgreen:

    vendredi 22 janvier 2016 à 19 h 48 min
  8. Maxime

    Lu sur igen : Fin de l’aventure pour la tablette Jolla.

    vendredi 29 janvier 2016 à 12 h 35 min
  9. Sirtin

    Merci pour le lien, dommage vraiment d’en arriver à ce résultat…

    samedi 30 janvier 2016 à 9 h 30 min

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